Les séries américaines sur les ados m'ont toujours fasciné. Déjà, parce qu'on n'y parle pas d'ados, mais de "teenagers", ce qui est quand même plus cool comme nom. Ensuite, parce qu'à âge égal, les ados américains des séries télé sont de toutes façons beaucoup plus cools que nous: pas un bouton d'acné, des parents cools, un look cool. Je ne parle même pas du fait qu'alors qu'on nous enlevait à peine les petites roues du vélo, le teenager avait déjà son permis de conduire. Là-bas, ils appellent ça la coolness (trop cool le nom), ici, c'est la coolitude (qui fait de suite penser à Lorie).

      Quand j'étais moi-même ado, j'adorais me tartiner le cerveau de séries américaines qui se déroulaient dans leurs bahuts. D'ailleurs, alors que nous on allait au collège accompagnés par maman, eux allaient au campus en skate: on n'a pas les mêmes valeurs, ok, mais bon quand même, ça nous faisait immédiatement passer pour des ringards. Dans les séries de teenagers, la vie c'est du chewing-gum, c'est fun et ça pète. Alors oui, dans nos magazines funs à nous, genre Télérama, on nous rassurait avec des histoires d'idéologie capitaliste du must have/must be anti-soixante-huitarde, mais bon quand même, qu'est ce qu'on n'aurait pas donné pour vivre la vie du teen' amerloque.

      Parce que l'ado, aux States, fait tout ce que tu peux pas faire, en plus de conduire. Comme il est trop cool, il chope toutes les filles du bahut, qui sont pour la plupart beaucoup plus bonnes que la plus bonne de tes copines. Et puis, c'est normal d'être cool quand on est taillé dans un tronc d'arbre, les filles aiment bien ça. Nous, on était taillés dans des bâtons de sucettes, les filles aiment bien ça aussi, mais pas quand elles sont ados. C'est comme ça. Du coup avec mes potes, l'espace de quelques jours, on s'était aussi inventé une life à la Parker Lewis et des intrigues à la Beverly Hills, histoire de donner du rêve, bordel.

    Dans un premier temps, fallait se trouver un surnom super cool, genre Kevin (si on s'appelle Jean), Brian (si on s'appelle Paul), ou Kevin-Brian (si on s'appelle Jean-Paul). Excusez du peu, mais la saveur de la langue anglaise fait que c'est plus joli de dire "salut, moi c'est Kevin-Brian" plutôt que "salut, moi c'est Jean-Paul". Du coup, certains petits mots anglais distillés avec ingénierie pouvaient déjà nous faire toucher du doigt la classe américaine: fuck, shit, hello, bye-bye en tête. Quelques sorties bien senties en mâchant fort des Malabars, c'était la classe assurée.

        Et l'ado américain, s'il est taillé comme ton prof de sport, c'est tout simplement parce qu'il fait du sport, et pas des échecs ou de la harpe. Pour ça, ils sont super organisés les américains, puisqu'ils ont tout plein de clubs de sports qui font trop rêver les filles, vous voyez, les Kings de Sacramento, les Giants de New-York, enfin, ce genre de trucs, quoi. Du coup, ils se baladent avec leurs supers blousons dans les couloirs du bahut, les filles se pâment, emballé c'est pesé. Comme se promener avec le survét' Tacchini de l'ASPTT du coin faisait pas assez exotique, fallait trouver autre chose.

       En France, si vous voulez jouer sur le terrain des américains (sur le foot américain en tt cas), c'est tout de suite moins glamour. En effet, quand on fait partie des Caïmans du Mans, des Orcs de Châteauroux ou des Titans de Beauvais (véridique), vous avez plus de chance de choper une MST derrière les gradins du stade, qu'un 06 devant la machine à Coca Light. Idem, aller chez Flunch c'est bien, mais aller chez Eddy's Bar Coffee Burger, j'vous fais pas de dessin, d'autant plus que c'est pas maman qui vous emmène et vous attend sur le parking pendant que vous essayez vaguement de draguer Samantha (l'autre nom de Pauline).

     Du coup, rapidement, on a été dépassés par le personnage. N'est pas James Dean qui veut, c'est plus évident d'être Dany Boon quand a pris roquefort-LV2... Et quand maman klaxonne alors que vous êtes en plein flunchage, qu'elle est loin l'Amérique! Alors vous finissez par vous faire une raison, autant faire comme eux et jouer la carte de la french-touch jusqu'au bout, un p'tit café-Rapido après les maths, ça te dit?